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Henri Vieilly

Henri Vieilly
Cours la ville 1900 - Annecy 1979


J’eus la chance de voir, au décès d’Henri Vieilly la remarquable exposition que lui consacra, sous l’autorité de Madeleine Rocher-Jauneau, le musée des Beaux-Arts de Lyon. Je conserve un souvenir marqué par une sensation d’urgence. Un vide venait de se creuser.
Mais qui était Henri Vieilly ? Tous ceux qui le connurent, évoquent un homme réservé, assez timide. L’évolution de son art est assez stupéfiante. D’abord, comme ses camarades Carlotti, Aynard, Chartres, Dumas, Pelloux, Couty, il fut marqué par l’influence cézannienne. Il composa des nus, des paysages dans la célébration de ses aînés les Ziniars. N’oublions jamais ce respect, cette amitié qui unissaient ces deux générations. En 1932, dans son autoportrait, il prend la pose comme Jean-Baptiste Chardin. Ses nus, première époque sont proches de René Besset, Il faut rechercher et chérir les nus de René Besset. Et puis, il transforma sa palette, et adopta des couleurs retenues, presque froides, dont un vert qui symbolise un peu sa signature. A cette époque, il rompit avec la perspective pour peindre à plat. Henri Vieilly se moquait bien de ce genre de considération, il ne s’inquiétait pas, comme trop d’artistes aujourd’hui de ménager ses collectionneurs, pour lui, seul comptait le plaisir de peindre . A la fin de son itinéraire, dans certaines grandes compositions de paysages, le sujet nous échappe, nous sommes dans un univers poétique qui tutoie la construction abstraite. On ressent alors, un désir de transgresser les schémas en place, les rites établis pour s’engager au risque de s’isoler pour longtemps. Voici le chemin sur lequel il s’avança, en compagnie de son ami de toujours, Pierre Pelloux, avec lequel, il partagea cette volonté de construire les voies modernes du langage pictural. Il faut pour comprendre cette proximité de pensée voir « Le champ de blé » et, « paysage familier » de 1964, et encore, « Les deux sapins » de 1967.
Parallèlement, à cet engagement absolu dans l’art de son temps, Henri Vieilly fut un professeur apprécié de ses élèves par la qualité de son exigence. Homme réservé, nous l’avons dit, il portait une immense attention aux corrections qui se déroulaient au sein de la classe, à l’école des Beaux-Arts. Gilles Humbert , le décorateur, se souvient de l’attitude d’Henri Vieilly qui se fixait face aux travaux présentés. Il entreprenait un mouvement d’avant en arrière, qu’il répétait, après avoir marqué un silence. Enfin, prenant l’élève par l’épaule, il lui lançait : « il faudra en faire… » Si le travail était particulièrement mauvais, il ajoutait : « Il faudra en faire... beaucoup !…». Jean-Marc Requien, fidèle à l’esprit d’Henri Vieilly, fut son élève de 1959 à 1961, il se souvient d’un homme ouvert qui n’interdisait rien, qui portait ses élèves vers la lecture et leur enseignait la liberté. Discret, il manifestait une curiosité attendrie et nul raisonnement n’était impossible. Il décrit les souvenirs de ses premiers jours de classe. « Je dessinais un plâtre : « la marquise ». Henri Vieilly vint à moi. Il m’interrogea. Vous êtes venu aux Beaux-Arts, pourquoi ? J’imagine que vos parents, les amis de vos parents, vous ont dit que vous étiez doué. Silence. C’est plus compliqué que ça le dessin. C’est plus compliqué que ça ! répétait-il ».
En 2003, les animateurs de la Maison Ravier organisèrent une remarquable rétrospective qui permit au jeune public de découvrir l’ensemble de cette oeuvre délicate. Difficile pari que celui de la rétrospective, mais il fut réussi, car cette peinture est cohérente, à chaque étape de son développement.
Le rêve éveillé d’Henri Vieilly a rejoint les plus folles descriptions des maîtres du roman d’anticipation. Parvenu au seuil des recherches des avant-gardistes de la modernité, Henri Vieilly a fait le saut dans l’ailleurs, parti du réel, du beau, il figure désormais, à partir des années soixante, dans une préfiguration d’une autre image de l’être humain. Plus qu’un peintre, Henri Vieilly fut un prophète. A Paris, il eut été parmi les premiers, à Lyon, nous devons dorénavant travailler à sa reconnaissance...