Des
professeurs hors normes...
Jacques Laplace marqua l’imagination des futurs membres du «
Sanzisme ». Il aimait dire : « Avant de dessiner, avant
de peindre, il faut savoir s’asseoir ». Cette boutade
en dit long sur l’humour et l’expérience de ces
joyeux drilles que furent les Ziniars au moral trempé par les
horreurs de la première guerre mondiale. Les « Nouveaux
» avaient connu les honneurs de la presse pendant les cinq années
où ils présentèrent ensemble leurs travaux à
la galerie Saint-Pierre Alfred Poyet. Une carrière enviable
leur était promise. Certains n’avaient qu’un peu
plus de dix ans d’écart avec leurs élèves.
Le matin les élèves avaient René Chancrin, excellent
pour donner à un jeune le goût et l’amour de la
peinture. L’après midi, ils retrouvaient Jacques Laplace,
moins attaché à la technique que René Chancrin,
plus désireux de voir ses élèves capables d’identifier
leurs émotions pour les traduire. Le soir, Venance Curnier
entrait en scène. Il lui arrivait de donner ce conseil : «
lorsque vous partez sur le motif, il faut prendre le temps de vous
imprégner du paysage, pour cela il faut tailler vos crayons
avec soin. »
Henri Vieilly eut une influence énorme sur ses élèves.
Il était peu loquace. Il aimait répéter après
avoir jeter un regard sur les dessins à corriger : «
Ah ! c’est pas facile !... C’est très difficile.
Ah ! c’est pas facile !... »
Antoine Chartres épris de modernité attachait beaucoup
d’intérêt à la composition. Dans son atelier
de la rue Cuvier, il peignait beaucoup, près de cent toiles
par an, très vite, toujours habillé de son complet veston
et sans répandre la moindre tache sur son vêtement.
René Dumas, lui, fascinait Jean Fusaro parce qu’il jouait
du piano en faisant de la peinture. Pendant son cours, René
Dumas faisait de longs discours chargés d’une certaine
émotion sur la peinture, comme en témoignent ses nombreux
carnets noirs, sur lesquels, il prenait de très nombreuses
notes, et inscrivaient ses pensées sur la peinture. René
Dumas aimait évoquer la haute figure de Gustave Courbet. Pour
corriger, il avait une méthode particulière. Il s’asseyait
à côté de l’élève après
avoir choisi un fusain qu’il écrasait sur le dessin.
Pierre Doye qui vécut cette expérience avoue qu’elle
lui apporta beaucoup.